Conférence de Shir Hever à Grenoble le 29 novembre 2024.
La conférence était organisée par la campagne BDS France en partenariat avec le comité local Attac Isère. La conférence portait sur les logiciels espions en général et sur l’industrie israélienne de la surveillance dont il est issu.
Chercheur en économie, Shir Hever est né à Jérusalem et vit aujourd’hui en Allemagne. Il est directeur de l’Alliance pour la justice entre Israéliens et Palestiniens (BIP), coordinateur de l’embargo militaire pour le Comité National Palestinien BDS (BNC) et l’auteur de plusieurs ouvrages dont « The Privatization of Israeli Security »[1].
En 2021, le Security Lab d’Amnesty International, suite à une enquête en collaboration avec 80 journalistes du consortium d’investigation Forbidden stories, révèle[2] que certains États utilisent le logiciel Pegasus de la start-up NSO Group[3].
Shir Hever alerte sur le fait que ces logiciels non seulement peuvent capter l’intégralité du contenu d’un téléphone ou d’un ordinateur mais peuvent aussi agir comme si c’était vous qui avait écrit un message, et introduire des données sans que ce soit décelable. L’intrusion de ce logiciel utilise les failles de conception des appareils numériques (vulnérabilité zéro-day), et on ne se rend donc compte de rien quand le téléphone est infecté. Aussi, une fois le téléphone infecté, toutes les données sont enregistrées dans les serveurs du NSO Group. L’usage de ces logiciels est aujourd’hui couplé à celui de l’intelligence artificielle qui trie et analyse l’information obtenue, les rendant encore plus performants.
Ce logiciel espion a permis d’espionner 50 000 personnes dont des militant·es des droits humains et de la justice climatique, des opposant·es politiques, des journalistes, des avocats, des hommes et femmes politiques dont des chef·fes d’état. Le logiciel est à l’origine de violations des droits humains à grande échelle partout sur la planète. D’autres États ont développé des logiciels espion, mais seul Israël en fait le commerce et les vends à de nombreux régimes autoritaires.
Shir Hever dit qu’il est impossible de s’en prémunir individuellement, et considère que la seule protection possible est collective. Son travail de fond très documenté mené avec la commission européenne PEGA a donné naissance à un rapport de plus de 200 recommendations[4], rapport dont l’Union européenne pourrait s’emparer et décliner au niveau des États membres. Jusque là le travail d’investigation et d’enquête du groupe PEGA, ainsi que l’audition du NSO Group devant le parlement n’ont pas encore abouti à un projet de loi permettant de réguler le commerce des logiciels espions.
Une centaine de personnes assistaient à la conférence. Deux militantes de Grenoble ont assuré une traduction remarquable sur ce sujet difficile. Le débat qui a suivi fut très riche grâce aux questions pertinentes du public ; et surtout grâce à une maîtrise bluffante du sujet par Shir Hever qui a répondu de manière claire et précise aux questions les plus techniques de la part de personnes très bien informées sur certains dossiers.
La conférence était enregistrée et sera sans doute publiée dans une forme condensée accessible à tout le monde francophone.
BDSF / Groupe Pega France / Embargo Militaire
[1] https://www.plutobooks.com/9780745337197/the-privatization-of-israeli-security/
[2] https://www.amnesty.fr/actualites/projet-pegasus-revelations-sur-un-systeme-mondial-de-surveillance
[3] https://www.bdsfrance.org/pegasus-nso/
[4] https://www.europarl.europa.eu/doceo/document/A-9-2023-0189_FR.html