JESSIE TU : Nelson Mandela a eu ce mot célèbre, « notre liberté sera incomplète sans la liberté des Palestiniens ». Je crois que ce qui se passe pour les Palestiniens, c’est une violation flagrante des droits humains les plus fondamentaux. Néanmoins, j’ai remarqué que mes opinions sont souvent jugées pro-palestiniennes et répressives, et étiquetées comme antisémites par ceux de l’autre côté. Comment un dialogue logique pourrait-il même s’engager quand la foi en l’égalité de tous les êtres humains est confrontée à une attitude défensive aussi agressive ?
TONY JONES : Nigel Kennedy, on commence par vous ?
NIGEL KENNEDY : Bon, ce sujet aussi me tient très à cœur, ayant eu il y a longtemps une petite amie palestinienne alors que j’étais adolescent, et je ne pouvais croire les histoires qu’elle me racontait. Et après m’être rendu en Palestine, et avoir joué avec des musiciens palestiniens, je pense que si nous parlions boycotts, nous pourrions nous demander combien de musiciens palestiniens réussissent-ils à jouer dans le monde et dans ce qui est connu maintenant comme Israël. Vous savez, les rencontres et rassemblements culturels palestiniens sont interrompus par la police. Des femmes meurent en essayant de donner naissance à leur enfant alors qu’elles tentent de passer le checkpoint, et cela parce qu’elles n’ont pas le bon laisser-passer pour ce jour-là, et je pense vraiment qu’un boycott culturel et sportif constitue le seul moyen pour changer les choses, parce que le monde saura, et que la machine de propagande qui décrit le peuple palestinien comme des terroristes sera quelque peu entravée.
Le peuple palestinien est un peuple admirablement cultivé, comme tout le monde l’est au Moyen-Orient. Si, vous le savez, tout le monde le sait, nous sommes allés si loin dans ce monde et nous ne traitons pas les peuples de façon égale, et quand un système d’apartheid est appliqué dans un pays quel qu’il soit, et je pense que le cas de l’Afrique du Sud l’a prouvé par sa réussite, c’est un boycott de ce type qui produit des résultats.
TONY JONES : Maintenant, sur cette question de l’apartheid, en accusant Israël d’être responsable d’une certaine forme de système d’apartheid, avez-vous rencontré beaucoup de problèmes en Grande-Bretagne ? Car effectivement, je crois que la BBC vous a interrompu, oui, interrompu durant un enregistrement où vous parliez précisément de ce que vous venez de dire ?
NIGEL KENNEDY : Eh bien, ça n’a pas été un gros problème, ils m’ont juste censuré. Vous savez, ils m’ont censuré deux fois, une autre fois dans la brochure du programme du concert, où j’avais écrit quelque chose dans le même sens, mais c’était juste quelques mots très simples qui disaient, regardez, quand nous ne sommes pas en situation d’apartheid, tous les musiciens sont égaux sur la scène, je disais, regardez ce qui peut arriver : une belle musique, des gens qui ne sont pas des terroristes, à moins qu’ils n’en soient forcés une fois mis au pied du mur. Si quelqu’un vient chez moi, prend cette terre, à la fin je tente de recourir à la violence pour la récupérer, vous savez.
TONY JONES : Mais comment pouvez-vous appeler cela un système d’apartheid quand il y a tant d’Arabes israéliens actuellement qui vivent comme des citoyens israéliens ?
NIGEL KENNEDY : Ils doivent représenter l’armée israélienne et alors abattre leurs frères et sœurs s’ils veulent avoir une citoyenneté égale dans ce pays. J’appellerais cela un apartheid, à part peut-être que les frères et sœurs africains, en Afrique, avaient sans doute un peu plus de liberté de mouvements et, s’ils voulaient donner naissance à un enfant, ils étaient sans doute admis dans un hôpital, même sans avoir le laisser-passer du jour.
(…)
BRENDAN O’NEILL : Je pense, vous savez, Nigel a dit qu’il avait été censuré par la BBC, mais maintenant, vous savez ce que c’est d’être universitaire israélien ou artiste israélien, ou acteur israélien.
NIGEL KENNEDY : Ou même acteur palestinien.
BRENDAN O’NEILL : Parce quand ils viennent en Grande-Bretagne pour présenter des spectacles israéliens, ils sont chassés de la scène. Ils se font copieusement hués. Un violoniste israélien a été hué aux Proms. Donc c’est cela le BDS. C’est censurer les voix israéliennes et c’est une démarche excessivement autoritaire. Je ne pense pas que les gens qui critiquent Israël soient des antisémites du tout, mais je suis préoccupé par la façon dont les critiques d’Israël sont devenues la cause la plus à la mode, la plus en vogue parmi toute la gauche en Occident, plus que tout le reste, et ce sont des gens qui maintenant se définissent à travers leur répugnance pour Israël. Vous n’êtes pas véritablement acceptés dans la bonne société actuellement à moins d’avoir, vous savez, signé une critique d’Israël et cela, je pense, est dommageable parce que cela imprègne le conflit au Moyen-Orient avec cette sorte de grande guerre occidentale entre les cultures. Cela transforme une guerre classique en une guerre de cultures. Cela définit les deux côtés et fait qu’une solution devient encore plus difficile.
TONY JONES : Vous voudriez probablement répondre à cela ?
NIGEL KENNEDY : Je voudrais voir plus d’artistes palestiniens avoir leur chance de se produire dans le monde entier de la manière…
EVA COX : Comme nous le voudrions tous, oui, mais ce n’est pas le sujet.
NIGEL KENNEDY : Ah oui. Et bien je crois que c’est le sujet si on signale les problèmes des artistes israéliens à se produire dans le monde, alors il y a un parallèle ici.
EVA COX : Oui.
NIGEL KENNEDY : Tout le monde a les mêmes droits.
http://www.abc.net.au/tv/qanda/txt/s3971827.htm
traduction : JPP pour BDS FRANCE
L’Australian Broadcasting Corporation, communément appelée « the ABC » (et informellement « Aunty » en référence au surnom de la BBC), est le diffuseur public national en Australie. Avec un budget total annuel de 1,13 milliard $AU, la société comprend des services de télévision, de radio, des plateformes en ligne et mobiles à travers l’Australie, mais aussi en outre-mer par le biais de l’Australia Network et de Radio Australia.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Australian_Broadcasting_Corporation