Photo : ActiveStills/Keren Manor
Ces directives considèrent que ces entités ne seront plus admissibles pour les subventions, primes et autres instruments financiers accordés par l’Union européenne à compter de 2014.
De prime abord, cette décision de l’Union européenne semble refléter un changement fondamental, indispensable et positif de la politique européenne et de ses relations avec la Palestine. Cependant, les Palestiniens et mouvements de solidarité ne doivent pas se réjouir de cette décision, qui, si elle semble condamner l’occupation, permet en réalité de légitimer le système colonial israélien et ses « entités » qui sont à l’origine de l’occupation.
Les colonies ne déterminent pas la politique. Elles constituent la conséquence inévitable de la politique fondamentale d’Israël qui est profondément ancrée dans la société israélienne et ses structures gouvernementales, semi-gouvernementales et non-gouvernementales.
L’ensemble des colonies s’appuient sur les lois et le système juridique israéliens. Elles constituent une entreprise d’État stratégique et sont considérées comme l’un des piliers d’Israël. En vertu des lois israéliennes, ces « entités » sont légales et légitimes. Elles sont par conséquent protégées et soutenues à tous les niveaux par l’État et les structures étatiques.
Une « priorité nationale »
Le gouvernement traite les colonies au même titre que d’autres sites existant aujourd’hui en Israël, à la différence que celles-ci bénéficient d’un plus grand nombre d’avantages. Elles offrent notamment des logements bon marché, une « priorité nationale majeure » en matière de budgets gouvernementaux, ainsi qu’une politique fiscale qui incite à y résider.
Par ailleurs, c’est la police israélienne, et non l’armée, qui est chargée de maintenir l’ordre et de servir la population dans les colonies. Celles-ci relèvent en outre des tribunaux civils et non du système de tribunaux militaires israéliens, ce qui tranche nettement avec l’administration militaire par Israël de la population palestinienne en Cisjordanie.
La politique de colonisation israélienne n’a pas été adoptée suite à l’occupation de 1967. Elle est la conséquence de l’occupation de 1948 et de la Nakba ou épuration ethnique ayant eu lieu en Palestine.
Ainsi, la ville de Nazareth Illit telle qu’elle existe aujourd’hui en Israël est construite sur des territoires qui ont été confisqués à Nazareth et huit autres villages voisins. Ceci vaut également pour la colonie de Maale Adumim qui est construite sur des territoires volés à la Palestine en Cisjordanie.
Israël est un pays riche et développé. Il est membre de l’Organisation de coopération et de développement économiques. Son gouvernement s’est engagé à traiter les colonies et leur population au même titre que Tel Aviv ou Haifa, voire de les privilégier.
Boycotter l’État d’Israël
Le gouvernement israélien dispose de ressources suffisantes pour financer et budgétiser tout ce qui n’entre pas dans les subventions européennes.
La soi-disant « ligne verte » qui marque la frontière entre l’actuel État d’Israël et la Cisjordanie n’existe pas aux yeux des Israéliens. Israël est une entité directrice individuelle, un système unique orienté à tous les niveaux vers une idéologie coloniale sioniste. La limitation des « sanctions » européennes aux colonies entraîne par le fait la légitimation du système et du caractère coloniaux de cet État. Ce qui revient à légaliser ce système.
La décision de l’Union européenne peut paraître juste, cependant, et malgré les belles promesses qu’elle offre, celle-ci a pour objectif de délégitimer les « entités » coloniales tout en légitimant l’État colonial.
Le seul moyen pour l’Union européenne d’avoir un véritable impact est de boycotter Israël en tant qu’État et de sanctionner l’ensemble de ses systèmes, y compris son système central, sans se limiter à certains aspects découlant de sa politique.
L’approche actuelle de l’Union européenne ne permettra jamais d’obtenir une paix équitable.
Source: http://www.info-palestine.net/spip.php?article14277
* Ameer Makhoul est un dirigeant de la société civile palestinienne et prisonnier politique enfermé à la prison de Gilboa.