Jérusalem, 11 avril 2012
Depuis que j’ai appris à penser, les poèmes auxquels vous avez donné vie résonnent dans ma tête. Des mots et des chansons qui n’ont cessé de m’accompagner dans les moments de joie, de tristesse et de lutte. Des mots qui retentissent dans mes expériences quotidiennes.
Je suis citoyen israélien, et cela fait déjà longtemps que je lutte afin de vivre dans un pays démocratique où l’on respecterait les droits individuels et collectifs de tous et chacun. Pour avoir suivi vos traces, je me sens personnellement offensé de vous voir mettre tant de poésie au service d’un régime répressif.
Lors des dix ans écoulés, l’Etat d’Israël s’est engagé dans une « sale guerre » contre le Peuple Palestinien. Cette guerre dans laquelle s’inscrivent des assassinats extrajudiciaires, des tueries de femmes et d’enfants, la destruction de l’infrastructure économique et sociale de la Palestine, des champs cultivés livrés aux flammes, et la construction du mur de séparation au sein même des villages palestiniens.
Lors des dix ans écoulés, plus de neuf mille Palestiniens ont perdu la vie suite aux agressions de l’armée israélienne.
Israël sème la peur et le désespoir en construisant des colonies, en démolissant des maisons et en réprimant quiconque ose contester sa politique. Pour vous donner un exemple, la semaine passée, plus de cent soixante dix personnes, dont deux enfants, ont été blessées par les forces répressives d’Israël, au seul motif d’avoir osé participer à des manifestations contre la confiscation des terres et contre le mur de séparation.
Pour reprendre les mots d’un grand intellectuel argentin, assassiné là bas par la dictature militaire, je dirais que ce que l’Etat d’Israël considère comme des succès sont des erreurs, que ce qu’il considère comme des erreurs sont des crimes et que ce qu’il tait sont des calamités. Mais la répression n’a pas réussi à atteindre son but car les Palestiniens n’ont pas renoncé à leurs rêves de souveraineté et d’indépendance.
Les israéliens eux-mêmes sont victimes de cette guerre. Ils sont victimes de l’agression quotidienne, irresponsable et infructueuse, contre le peuple palestinien. Au point que quand l’Etat entreprend les attaques les plus mortifères contre le peuple palestinien, il est incapable de garantir la sécurité des citoyens israéliens. Les bombardements sur la Bande de Gaza assiégée et les tanks à Hébron, ne peuvent que créer des êtres humains dont l’humanité disparaît face au désespoir et à l’humiliation.
Et ainsi les victimes de ce conflit auront été inutiles puisque toute « victoire » de la répression israélienne ne sert qu’à aggraver le conflit en créant de nouvelles formes de résistance, étant donné que les causes qui provoquent la résistance du peuple palestinien, non seulement n’ont pas disparu mais sont exacerbées par le souvenir et les atrocités commises.
Pourquoi avez-vous décidé de soutenir le régime d’apartheid d’Israël ? Pourquoi avez-vous décidé de soutenir un régime qui, chaque jour, rend la vie impossible à des centaines de milliers de personnes et dénie le droit à l’autodétermination de tout un peuple ?
Ne croyez pas que votre concert à tel Aviv soit un acte innocent. Ce concert servira à créer une fausse image de normalité. A créer une réalité qui n’existe pas, en faisant fi de la souffrance de millions de personnes condamnées à vivre en état de siège permanent, pour le simple fait d’être nées.
Peut-être faudrait-il alors redire ce qu’avait écrit Mario Benedetti et chanté Joan Manuel Serrat, en rappelant que la Palestine, elle aussi, existe. Je vous en prie, ne tuez pas l’espérance.
Sergio Yahni (traduction de l’espagnol: M.S.) http://sergioyahni.wordpress.com/2012/04/11/cara-abierta-a-joan-manuel-serrat-y-joaquin-sabina-no-maten-la-esperanza/
Carta abierta a Joan Manuel Serrat y Joaquín Sabina: no maten la esperanza
11 Apr
Jerusalén, 11 de abril de 2012
Desde que aprendí a pensar resuenan en mi cabeza las poesías a las cuales ustedes han dado vida. Palabras y canciones que siempre me han acompañado en momentos de alegría, de tristeza y de lucha. Palabras que repercuten en mis experiencias cotidianas.
Soy un ciudadano de Israel, ya hace muchos años lucho para poder vivir en un país democrático donde se respeten los derechos individuales y colectivos de todas las personas. Como quien ha seguido vuestros caminos me siento personalmente ofendido al ver que subyugan tanta poesía al servicio de un régimen represivo.
En la ultima década el Estado de Israel ha emprendido una “guerra sucia” contra el Pueblo Palestino. Esta guerra incluye asesinatos extrajudiciales, matanza de mujeres y niños, la destrucción de la infraestructura económica y social palestina, la quema de campos de cultivo y la construcción del muro de separación en el propio seno de la población palestina.
En esta ultima década más de 9 nueve mil palestinos han perdido su vida por causa de las agresiones del ejército de Israel.
Israel siembra miedo y desesperación construyendo colonias, demoliendo residencias y reprimiendo a quien se atreve a contestar sus políticas. Para darles un ejemplo, la semana pasada más de 170 personas, dos de ellas niños, fueron heridas por las fuerzas represivas de Israel solamente por osar participar en manifestaciones contra la confiscación de tierras y contra el muro de separación.
Repitiendo las palabras de un gran intelectual argentino asesinado por la dictadura militar en ese país, diría que lo que el estado de Israel reconoce como aciertos son errores, los que reconoce como errores son crímenes y lo que omite son calamidades. Pero la represión militar no ha conseguido realizar su objetivo final y los palestinos no han renunciado a sus sueños de soberanía e independencia.
Los israelíes también son víctimas de esta guerra. Son víctimas de la irresponsable y fracasada agresión cotidiana contra el pueblo palestino. Aun en momentos en que el estado emprende los más mortíferos ataques al pueblo palestino, éste no puede cumplir con su deber de proporcionar seguridad a los ciudadanos israelíes. Los bombardeos sobre la Franja de Gaza asediada y los tanques en Hebrón no hacen más que crear seres humanos cuya humanidad desaparece ante la desesperación y la humillación.
Y así, las victimas de este conflicto han sido en vano ya que cualquier “victoria” de la represión israelí no haría más que profundizar el conflicto creando nuevas formas de resistencia porque las causas que mueven la resistencia del pueblo palestino no habrían desaparecido sino agravadas por el recuerdo y las atrocidades cometidas.
¿Por qué han decidido ustedes apoyar el régimen de apartheid de Israel? ¿Por qué han decidido apoyar un régimen que destruye cotidianamente la vida de cientos de miles de personas y niega el derecho a la autodeterminación de un pueblo?
No creáis que vuestro concierto en Tel Aviv sea un acto inocente. Este concierto está siendo explotado para crear una falsa imagen de normalidad. Crear una realidad que no existe omitiendo el sufrimiento de millones de personas condenadas a vivir bajo un asedio constante, por el simple hecho de haber nacido.
Quizás cabria repetir lo escrito por Mario Benedetti y cantado por Joan Manuel Serrat, recordando que Palestina también existe.
Por favor, no maten la esperanza.
Sergio Yahni