Laurent Garnier
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Paris le 24 novembre 2014
Cher Monsieur, cher Laurent Garnier,
Nous avons appris que vous projetiez de donner un spectacle au Block Club à Tel Aviv jeudi prochain. DJ reconnu, votre présence est la garantie d’une soirée musicale de qualité.
Nous tenons néanmoins à vous informer qu’au moment même où vous ferez danser quelques centaines de citoyens israéliens, le gouvernement de l’Etat d’Israël verra avec grande satisfaction le soutien, certes indirect, que vous apporterez à sa politique d’occupation illégale, plusieurs fois dénoncée par des résolutions des Nations Unies ainsi qu’aux nombreux crimes de guerre commis contre le peuple palestinien identifiés aussi bien par la Cour international de Justice que dans le rapport Goldstone.
En effet, les tentatives israéliennes pour masquer le déni du droit à l’autodétermination reconnu dans plusieurs normes du droit international et l’oppression des Palestiniens subie depuis plusieurs décennies, s’appuient sur la capacité de cet Etat à présenter une soi-disant image progressiste et démocratique aux yeux de la communauté internationale, qui, en soutenant cet Etat, manque ainsi à toutes ses obligations.
Les propriétaires du Block Club, où vous envisagez de vous produire, sont ravis que le Ministre israélien des Affaires étrangères utilise leur nom dans ses vidéos promotionnelles. Ce même ministre qui «voit la culture comme un outil de propagande de premier plan» mais ne fait aucune différence entre propagande et culture. La culture, pour les valeurs universelles qu’elle doit défendre, ne peut être associée à une propagande mensongère visant à entériner une politique d’occupation et de violations graves des droits fondamentaux des Palestiniens.
Tel Aviv est souvent présentée comme une ville «cool», «ouverte» et «tolérante», mais nous ne devons jamais oublier qu’elle s’est, comme beaucoup d’autres villes israéliennes, étendue sur les ruines de plusieurs villages palestiniens dont les habitants ont été tués ou expulsés pendant la Nakba de 1948. L’Etat d’Israël se présente souvent comme « la seule démocratie du Moyen-Orient», alors que sa politique d’apartheid, par exemple ne permettra pas aux Palestiniens de venir à Tel Aviv et d’assister à votre spectacle.
Bien sûr, ceci n’est qu’un exemple -parmi de nombreux autres- et les privations causées par l’occupation vont bien au-delà de l’interdiction d’assister à un concert. Tous les aspects de la vie des Palestiniens sont contrôlés par l’armée d’occupation israélienne, depuis la possibilité d’étudier, de travailler, de se soigner ou de voyager, jusqu’aux permis de construction sur leur propre territoire. À Silwan, près de Jérusalem Est, à 45 minutes du lieu prévu pour votre concert, des enfants ont récemment été arrêtés et soumis à la violence d’interrogatoires policiers, sans l’assistance d’un avocat ou de la présence de leurs parents. Les Palestiniens qui vivent dans la bande de Gaza (56% d’entre eux ont moins de 25 ans) subissent un siège illégal, ainsi que cela a été plusieurs fois rappelé par les institutions internationales, affectant leur santé, limitant leur accès à l’eau, aux soins et traitements médicaux et brisant leur vie, sans oublier l’horreur meurtrière à laquelle à assisté le monde entier en 2009, en 2012 et durant l’été 2014.
De nombreuses personnalités, et parmi elles de nombreux musiciens et artistes, sont venues voir par elles-mêmes le traitement vécu au quotidien par les Palestiniens sous domination israélienne, avec l’intention de se servir de leur art pour changer l’opinion publique israélienne et répandre un message de paix. Ces artistes ont finalement compris que leurs spectacles, malgré leurs bonnes intentions, étaient détournés et utilisés pour donner un feu vert à l’actuelle politique d’oppression d’Israël.
Des représentants de la société civile palestinienne, incluant plus de 170 organisations différentes, de femmes, d’universitaires, de travailleurs, ont lancé un appel en faveur d’une campagne de boycott, de désinvestissement et de sanctions (BDS) contre la politique israélienne. Ils demandent en particulier aux artistes internationaux de ne pas se produire en Israël jusqu’à ce que cet Etat respecte les normes impératives du Droit international et du droit humanitaire international.
Face à l’impunité dont bénéficie l’Etat d’Israël, partout dans le monde, des militants et des citoyens de conscience se sont levés en relayant cet appel au BDS. Des artistes de tous les pays et de tous styles musicaux ont entendu et répondu positivement à cet appel, entre autres Cassandra Wilson, Annie Lennox, Cat Power, Lhasa, Stevie Wonder, Roger Waters, Peter Gabriel, Elvis Costello, Carlos Santana, Gil Scott-Heron, Jello Biafra, MF Doom, Joker, Ewok, Massive Attack, Faithless, The Klaxons, The Killers, Gorillaz Sound System, Salif Keita, Gilles Vigneault, Nigel Kennedy, plus de 600 acteurs culturels suisses, 500 artistes canadiens, 500 artistes irlandais et une centaine d’intellectuels norvégiens, mais aussi Ken Loach, Jean-Luc Godard, Peter Brook, Susan Sarandon, Meg Ryan, Angela Davis, Naomi Klein, Eduardo Galeano, Stephen Hawking, Henning Mankell, Eric Cantona, Frédéric Kanouté ou Trevor Hogan…
Cher Laurent Garnier, que vous le souhaitiez ou non, vos concerts seront interprétés comme un soutien politique à l’Etat israélien, et non pas comme un simple événement culturel.
Nous espérons pouvoir vous compter parmi les artistes de conscience qui rejoignent le mouvement international de boycott, et qu’auprès d’eux vous allez vous engager à ne pas légitimer les politiques racistes de l’Etat israélien.
Nous comptons sur vous, et nous restons à votre entière disposition pour vous fournir toute autre information que vous jugeriez utile sur cette question.
La Campagne BDS France