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20/11/11

Lettre d’artistes de Gaza à Mireille Mathieu

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Vous avez chanté autrefois votre complainte des soldats partant en guerre, «  En rang, soldats de l’amour », en les exhortant, « Partez au nom de l’amour ». Et pourtant vous projetez d’aller divertir les forces armées israéliennes…

Gaza assiégée, Palestine occupée

Chère Mireille Mathieu,

Nous sommes un groupe d’artistes, musiciens et chanteurs de Gaza. Nous avons appris que vous projetiez de donner un spectacle dans l’Israël de l’Apartheid ! Pour nous cela a été une surprise, considérant vos positions contre la guerre, et une musique qui se voue à dénoncer ce genre d’agressions que nous, Palestiniens, vivons jour après jour sous l’occupation militaire de la quatrième puissance militaire du monde. Vous avez chanté autrefois votre complainte des soldats partant en guerre, «  En rang, soldats de l’amour », en les exhortant, « Partez au nom de l’amour ». Et pourtant vous projetez d’aller divertir les forces armées israéliennes qui contrôlent, limitent et abaissent notre existence elle-même, et beaucoup d’entre ces soldats seront dans la foule pour laquelle vous avez l’intention de chanter. En ce moment même, des soldats israéliens commettent en toute impunité toutes sortes de crimes de guerre largement établis contre nous, la population indigène de Palestine.

Nous vous demandons, maintenant, de prendre en considération notre appel à boycotter le seul régime d’apartheid au monde qui nous garde emprisonnés (1). De l’intérieur de ce que les principales organisations pour les droits de l’homme appellent la plus grande prison à ciel ouvert de l’histoire contemporaine, nous vous le disons, il faut que cessent ces cinq ans de blocus d’Israël et ces 63 ans de dépossession et de nettoyage ethnique. D’ici-là, nous comptons sur les personnes de conscience, et notamment les artistes et musiciens, pour prendre position et refuser de se produire en Israël.

Vous êtes connue comme une personne ayant de la compassion, qui est passée par la pauvreté et les privations ; votre propre mère était une réfugiée. Imaginez alors la vie que nous avons dans Gaza ! Plus des deux tiers d’entre nous sommes des réfugiés reconnus par les Nations-Unies, victimes d’un nettoyage ethnique et jetés hors de nos maisons par la toute nouvelle armée israélienne en 1948, pour aller vivre le reste de notre vie dans le camp de concentration de Gaza. Des millions d’autres réfugiés, vivant en exil, se voient toujours privés de leur droit à revenir dans leur foyer et de revoir leurs êtres chers, à cause de la politique d’Israël qui entrave nos déplacements et de son refus à se conformer au droit international.

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Avec le patrimoine de musique et de danse qui est le nôtre et que nous aimons faire vivre en scène, nous sommes privés des instruments, de la possibilité d’accueillir des spectacles internationaux et de faire connaître notre musique à l’étranger.

Cinq années de blocus continu de la bande de Gaza où nous vivons ont rendu notre existence encore plus insupportable, elles réduisent au minimum les nourritures et les gens qui pénètrent dans Gaza, provoquant de graves pénuries de vivres, de produits de base et de matériaux essentiels comme le ciment, indispensable à la reconstruction des 17 000 maisons détruites par les attaques israéliennes. Nos blessés et nos malades ne sont pas autorisés à aller à l’étranger recevoir toutes sortes de traitements médicaux devenus indisponibles à Gaza : ainsi, 600 malades sont décédés parce qu’ils n’avaient pas d’autre choix que de rester dans la bande de Gaza assiégée, où ils vécurent leurs derniers jours, au désespoir de leurs familles. Pour nous, musiciens, avec le patrimoine de musique et de danse qui est le nôtre et que nous aimons faire vivre en scène, nous sommes privés, par le siège israélien des instruments, de la possibilité d’accueillir des spectacles internationaux et de faire connaître notre musique à l’étranger. Le blocus aérien, terrestre et maritime d’Israël sur toutes nos frontières fait que depuis des années, les instruments de musique sont interdits d’entrer dans Gaza (2).

En plus de ce siège barbare, pendant l’hiver 2008/2009, Israël a attaqué Gaza, commettant des crimes de guerre et des violations des droits humains contre une population dont plus de la moitié, soit 800 000 êtres humains, se compose de mineurs. Durant cet assaut sans merci qui dura 23 jours, 1417 personnes ont été tuées, dont des centaines d’enfants, et plus de 5500 furent blessées. Ces crimes odieux ont été rapportés en détail dans un rapport des Nations-Unies, le rapport Goldstone (3).

Face à une conspiration internationale du silence, la société civile palestinienne, quasi unanimement, a appelé les artistes de niveau international à refuser de se produire en Israël, dans le cadre d’une campagne BDS (Boycott, Désinvestissement et Sanctions), méthode non violente visant à ce qu’Israël soit tenu responsable de ses violations des normes relatives à l’égalité et aux droits des êtres humains et auxquelles sont coutumières toutes les nations modernes. Votre spectacle en Israël serait un rejet de cet appel qui est celui de tout le mouvement BDS mondial. Un mouvement qui comprend des centaines de vos fans luttant pour la justice pour le peuple palestinien à travers la campagne BDS. L’appel BDS est aussi approuvé par beaucoup de héros anti-apartheid d’Afrique du Sud, tel l’archevêque Desmond Tutu qui a qualifié d’« inadmissible » (4) le spectacle de Cape Town Opera, sud-africain, présenté en Israël au début de cette année.

Une foule de musiciens de renommée internationale a déjà rejoint cet appel en refusant de se produire en Israël, notamment Carlos Santana, Annie Lennox, Faithless, Elvis Costello, les Pixies, Gil Scott Heron, Massive Attack, Leftfield, Gorillaz Sound System, Bono, Snoop Dogg, Jean-Luc Godard, Devendra Banhart. Roger Waters des Pink Floyd, autre icône des années soixante qui se dévoue contre la guerre et l’oppression, a écrit une lettre annonçant son soutien au boycott culturel d’Israël. Il dit que selon son opinion, « …le contrôle épouvantable et draconien qu’Israël exerce sur les Palestiniens assiégés dans Gaza, et sur les Palestiniens en Cisjordanie occupée, ajouté à son déni des droits des réfugiés à revenir dans leurs foyers en Israël, exige que les gens empreints d’honnêteté à travers le monde soutiennent les Palestiniens dans leur résistance civile, non violente » (5).

Nous vous demandons de rejoindre leur combat, notre combat pour les droits fondamentaux des êtres humains, pour l’égalité et la justice. Il est temps pour le monde d’agir réellement pour que cessent les crimes de guerre d’Israël contre les enfants, les femmes et les hommes ; il est temps pour les personnes de conscience de se placer du bon côté de l’histoire en refusant de cautionner les crimes de guerre de l’État israélien.

Nous, musiciens, chanteurs et artistes palestiniens, ici dans le ghetto de Gaza, nous espérons profondément qu’un jour, nous aurons tous les droits qui nous sont refusés et auxquels tout musicien a légitimement droit, c’est tout ce que nous demandons. Nous ne serons pas parmi le public qui assistera à votre concert à Tel Aviv !

Nous vous exhortons à dire oui à l’appel palestinien pour un boycott de l’Israël de l’apartheid, jusqu’à ce que ce pays respecte le droit international ; nous vous demandons de vous mettre du bon côté de l’histoire et de vous abstenir de divertir un régime qui a commis, et continue de commettre, des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité. Accepterez-vous de revenir sur votre projet ?

[1] http://www.pacbi.org/etemplate.php?…
[2] http://www.gazagateway.org/tag/musi…
[3] http://www2.ohchr.org/english/bodie…
[4] http://www.guardian.co.uk/global/20…
[5] http://www.bdsmovement.net/2011/wat…

Lettre signée par :

Mohammed Musa (chanteur)
Mohammed Shahwan (violoniste)
Yousuf Fares (jouer d’oud)
Saadullah El Banna (chanteur)
Khamis Wafi (musicien)
Wael Wafi (musicien)
Isam Banna (joueur d’oud)
Said Wafi (musicien)
Khaled Faraj (chanteur)
Mohammed Shaath (violoniste)
Mohammed Assaf (chanteur)
Fahmy Saqqa (chef d’orchestre)
Mounir Hallaq (violoniste)
Jammal Abu Shammala (chanteur)
Mohammed Ahmed (chanteur)
Fedaa Jerjawi (chanteur)
Amjad Masri (tambours)
Jaber El Hajj (guitariste)
Mahmoud Nawajha (joueur d’oud)
Belal Shaaer (musicien)
Issa Abu Oudeh (tambours)
Jamal Abu Oudeh (chanteur)
Khaled Salim (chanteur)
Ahmed Musran (Musician)
Mohammed Najjar (flutiste)
Mohammed Abu Ghalioun (musicien)
Fawqi Jawadeh (joueur de kanoun)
Shadi El Aqqad (musicien)
Basem El Haj (tambours)
Emad Masoud (chanteur)
Bassam Abu Jiab (chanteur)
Fadl Lelli (compositeur)
Samir Shataly (chorégraphe)
Ismail El-Agha (musicien)
Naim Nasr (compositeur)
Samir Mousa (chanteur)
Ibrahim Zinaty (musicien)
Ibrahim Lulu (joueur d’oud)
Mohammed Abu Eisha (musicien)
Basem Shakhsa (chef d’orchestre)
Salah Abu Hamad (compositeur)
Akram Ubaid (directeur)
Soud Mohanna (directeur)
Wael Yazji (compositeur)
Mohammed El Masri (compositeur)
Hassan Kharoubi (musicien)
Akram Hassan (chanteur)
Mohammed Bardawil (joueur d’oud)
Rami Okasha (chanteur)
Samir Shatali (chorégraphe)
Ali Abu Yasin (directeur)
Zuhair Balbisi (acteur)
Sami Sattoum (acteur)
Hassan Khatib (acteur)
Inas Saqqa (actrice)
Majeda Taleb (actrice)
Hazem Abu Humaid (directeur)
Wael Hajjou (acteur)
Jawad Harrouda (acteur)
Said Eid (directeur, acteur)
Rami Abu Shawish (acteur)
Mervat Hafez (actrice)
Hassan Aydi (directeur)
Abdulnaser Eid (acteur)
Mohammed Lelli (acteur)
Fadi Ledawi (acteur)
Daoud El Haj Ahmed (joueur d’oud)
Mohammed Abu Sido (directeur)
Ahmed Abu Nasr (dramaturge)
Mohammed Abu Nasr(dramaturge)

18 novembre 2011 – The One Democratic State Group – traduction : JPP

Source info Palestine ici

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