UNE JOURNÉE DE COMMÉMORATION COLONIALE EN VIOLATION DU DROIT INTERNATIONAL
Voici comment Frédéric CORCOS, l’ex-Président du Centre Communautaire et Culturel juif (CCCJ) de Montpellier, annonçait publiquement en 2011, la 33ème « journée de Jérusalem » à Montpellier : « Notre attachement à cette commémoration de la réunification de la ville de Jérusalem reste un particularisme spécifique à Montpellier et unique en Diaspora… A travers le symbole de cette journée, nous crions, avec tous nos amis, haut et fort, notre sionisme et notre soutien à l’Etat d’Israël !… JERUSALEM EST ET DOIT RESTER LA CAPITALE DE L’ETAT D’ISRAËL !(…) Venez très nombreux commémorer ce 33ème anniversaire de la Journée de Jérusalem et soutenir ainsi l’Etat d’Israël, seul rempart de notre Peuple. Vive Israël ! »
C’est dit on ne peut plus clairement : il s’agit d’une manifestation politique sioniste de soutien à l’état colonial israélien en violation du droit international..
Depuis 2009 le comité BDS France 34 mène campagne contre cette commémoration organisant conférences , stands d’information sur la place de la Comédie (https://bdsf34.wordpress.com/2015/06/08/6-7-juin-week-end-de-manifestations-contre-la-journee-sioniste-a-montpellier/) et manifestations annuelle sur le site de la dite manifestation.(https://bdsf34.wordpress.com/2015/06/08/6-7-juin-week-end-de-manifestations-contre-la-journee-sioniste-a-montpellier-2/#more-2495). Une pétition papier a été lancée soutenue par une quinzaine d’organisations.
Ces actions ont contraint les organisateurs à changer leur discours d’appel et leurs affiches. Ils ne déclament plus « Jérusalem capitale une et indivisible du peuple, juif, de l’état d’Israël etc. Ils mettent cyniquement des colombes ou encore osent parler du « vivre ensemble »…
Par contre à l’intérieur de la fête, toujours en présence du consul d’Israël la banderole affiche la teneur de la journée ainsi que les interventions et les stands …
AVEC LE SOUTIEN DES EXÉCUTIFS DE LA RÉGION, DU DÉPARTEMENT DE LA MÉTROPOLE ET DE LA VILLE DE MONTPELLIER
Non seulement tous les exécutifs (majorité PS) soutiennent financièrement cette journée et affichent leurs logos sur le matériel de communication, mais ils la soutiennent politiquement par l’envoi de représentants qui viennent applaudir le discours colonial du Consul et de la présidente du CCCJM, ainsi plus d’une dizaine des nouveaux de la Ville de Montpellier étaient présents en 2014 ! Ainsi l’argent des contribuables est utilisé pour financer une opération qui appelle à célébrer un acte colonial, condamné par 4 résolutions de l’ONU (252, 476, 478, 672).
La préfecture et la Ville s’attaquent – à la demande de la LICRA et du CRIF – à l’ expression publique du comité BDS France en prévention, disent-ils- de troubles à l’ordre public – alors que le comité BDSF34 ne fait que réclamer l’application du droit international et des droits humains par Israël à l’égard des Palestiniens. Et quand la LICRA-CRIF, CCCJM et autres officines sionistes violent ouvertement le droit international en commémorant un acte colonial condamné par l’ONU, et causent de ce fait un trouble à l’ordre public, les élus viennent applaudir les tenants de l’apartheid israélien et la préfecture envoie sa police contre la manifestation BDSF34 qui proteste contre cette violation du droit.
Nous avons aujourd’hui dans cette bataille pour le droit un allié de taille en la personne de Gidéon Levy qui écrit dans Haaretz. Il s’agit d’ un des rares journaliste israélien, juif, qui inlassablement dénonce les tueries, les crimes de l’armée, des colons, la violence de la société israélienne pourrie par le colonialisme. Il fait preuve d’un courage admirable et malgré les menaces de morts qu’il reçoit il persévère et a récemment rejoint apporté son soutien au BDS.
Nous espérons que ses propos éclaireront tous les élus-es qui ferment les yeux sur cette journée, les Yvonne Le Dain qui n’en rate pas une, Saurel qui est venu avec un aéropage d’élus-es …
Bravo et merci M. Gidéon Levy !
La Rédaction BDSF3
La Journée de Jérusalem, un jour de deuil
« Un jour, la Journée de Jérusalem deviendra un jour de deuil national. Les drapeaux seront en berne. Les sirènes hurleront et les Israéliens se recueilleront en mémoire de leur rêve évanoui. Le 28 du mois d’Iyar entrera dans le calendrier des jours de deuil d’Israël, coincé entre le jour commémoratif des soldats disparus et Tisha B’Av, et sera un jour commémorant la destruction du rêve, qui tombera avant le jour commémorant la destruction du Temple.
A la Journée de Jérusalem, les Israéliens marqueront la fin de leurs 19 courtes années d’innocence et le début de la malveillance institutionnelle et systématique de leur Etat. Ils ne comprendront pas comment, des années durant, ils ont osé célébrer le jour de l’occupation comme une fête nationale établie par la loi, ni comment ils pouvaient voir en Jérusalem, la ville symbolisant la tyrannie et le racisme de leur État, comme l’objet de leurs désirs. Quand cela arrivera, si cela arrive, on le saura, la société sera guérie de son mal fatal.
Aujourd’hui, seule une infime partie des Israéliens célèbrent la Journée de Jérusalem. Cela ne représente rien pour la plupart d’entre eux qu’ils soient laïcs, ultra-orthodoxes ou Arabes. La mariée n’intéresse pas non plus la plupart des Israéliens. Quand y êtes vous allé la dernière fois pour vos loisirs ? Quand étiez-vous au mur des lamentations ? Et pourquoi y seriez-vous ?
Cette fête nationale fut et demeure la fête des chauvins religieux, célébrée par une minorité hurlante et menaçante qui y donnent leur marque particulière. Ils célèbrent le seul plaisir de Jérusalem – se réjouir du malheur des autres, – par une manifestation de drapeaux entièrement basée sur le plaisir de piétiner la dignité de l’autre nation à laquelle Jérusalem appartient également.
Une ville pauvre, crasseuse et négligée, que les Juifs laïcs quittent aussi vite que possible, à laquelle les Palestiniens s’accrochent avec toute leur maigre force et que les Juifs religieux, chauvins et extrémistes occupent depuis longtemps. C’est une ville qui envoie ses métastases de colons dans chaque quartier palestinien, dans l’unique but d’y faire régner la misère, de dépouiller, d’opprimer et d’évincer. Et tout cela sous les auspices des autorités, y compris du pouvoir judiciaire, l’autorité la plus éclairée d’Israël.
Il s’agit d’une ville manifestement binationale qui aurait pu être un paradigme de coexistence dans un État démocratique, une sorte de modèle pour rétablir une relative justice. A la place, à cause de la rapacité israélienne pour l’immobilier et le massianisme, Jérusalem est devenue l’essence du pillage, de l’agression, des violences et de l’arrogance d’Israël.
Le jour de « libération » de cette ville insupportable, qui est le jour de son occupation, c’est le jour qui en a fait ce qu’elle est maintenant, un monstre de béton et un Moloch de l’occupation. Aujourd’hui nous sommes sensés célébrer ce jour, d’après la loi. Aucune personne de conscience ne peut faire ça.
J’aimais Jérusalem quand j’étais jeune. Même durant la courte gueule de bois après l’orgie de 1967 qui nous infecta presque tous, nous restions captivés par sa stupéfiante beauté. A cette époque nous croyions encore ce qu’on nous racontait, que la ville était « libérée » et « unie » pour toujours et que Teddy Kollek, le Viennois libéral, était un conquérant éclairé.
Mais bientôt sa beauté fut mutilée jusqu’à la rendre méconnaissable, rien ne demeura, et commença l’inévitable retour aux réalités. Seuls les aveugles et les ignorants peuvent encore s’y plaire. Qui peut prendre du plaisir à visiter une ville dont chaque pierre crie à l’occupation ?
Avec l’équipe de football la plus raciste de la ligue, et le maire le plus chauvin localement au pouvoir – ni l’un ni l’autre par hasard – Jérusalem est devenue le symbole de l’occupation et la preuve la plus convaincante de son apartheid. Plus d’un tiers des habitants de Jérusalem, soit 37 %, sont des Palestiniens qui devraient avoir les mêmes droits mais qui sont assujettis de toutes les façons possibles. Ce n’est pas par hasard que de tous les lieux possibles, c’est là que le soulèvement désespéré des solitaires, la troisième intifada, est née.
Cela aurait pu être différent. Si Israël avait reconnu les Palestiniens comme égaux aux Juifs et les Palestiniens comme ayant les mêmes droits que les Juifs dans la ville, aujourd’hui Jérusalem et Israël seraient différents. Mais Israël n’a jamais résisté à la tentation. Il y a 49 ans, jour pour jour, Israël a conquit une partie de la ville, et depuis ce jour, a tout fait pour en faire une ruine morale.
Et c’est ce que nous pleurerons un jour, durant la Journée de Jérusalem.
Gideon Levy, 5 juin 2016
http://www.haaretz.com/opinion/.premium-1.723116
Traduction : JPB