Le Courrier de l’Atlas, vendredi 31 janvier 2014 de Nadir Dendoune.
Hier, jeudi 30 janvier, le CRIF (Conseil représentatif des institutions juives de France) indiquait par le biais de son site internet, qu’au cours de l’entretien que ses dirigeants avaient eu le 28 janvier avec les responsables de la CGT Thierry Lepaon, Secrétaire Général et Éric Laffont, secrétaire confédéral, que ces derniers avaient démenti tout soutien au BDS (Boycott Désinvestissement Sanction), contre Israël. Le CRIF affirmait même que les responsables de la CGT avaient déclaré que « si des militants de la CGT ont pu, ici ou là, afficher un tel soutien, ils n’avaient aucun mandat pour le faire ».
Toute la journée hier, de nombreux militants, indignés par les propos qu’auraient tenus les responsables de la CGT, sont montés au créneau poussant Thierry Lepaon à s’exprimer sur la question. Voici le courrier qu’il a envoyé à Roger Cukierman, où M. Lepaon demande au président du CRIF de supprimer l’article. Un recadrage nécessaire. En effet, pour M. Lepaon, le compte rendu du Crif est « à la fois partiel et erroné ».
Monsieur le Président,
Je suis très étonné de découvrir un compte-rendu à la fois partiel et erroné de la rencontre que nous avons eue avec vous-même et des représentants de votre association. Rappelons que cette rencontre faisait suite à une invitation de votre part afin d’évoquer les questions d’actualité et notamment la question de la montée de l’extrême droite et notre inquiétude commune face aux relents d’antisémitisme, d’islamophobie et plus globalement de racisme dans notre pays.
Sur la méthode d’abord, lorsqu’une rencontre de ce type est prévue avec des dirigeants de la CGT et notamment le Secrétaire général, il est d’usage de nous faire part au préalable de l’intention de rendre compte publiquement de l’échange et d’en faire vérifier le contenu par les participants. Ce manque de rigueur de la part d’une organisation comme le CRIF est de nature à entacher une relation de confiance entre nos organisations.
Cette démarche aurait permis de corriger une grave inexactitude dans les propos que vous me prêtez concernant la position de la CGT vis-à-vis de la campagne BDS (Boycott Désinvestissement Sanction).
En l’occurrence, je n’ai fait que confirmer que la CGT ne s’inscrivait pas dans la campagne BDS. En revanche, la CGT n’a jamais condamné ni ce mouvement ni ses acteurs dont certains sont d’ailleurs des adhérents de la CGT.
Le titre de l’article « La CGT condamne le BDS » posté sur votre site sous la rubrique « Le CRIF en action » me paraît relever d’une intention qui n’est pas respectueuse à l’égard de la CGT et de ses prises de positions.
Je vous demande donc de le supprimer.
Afin qu’il ne subsiste aucune ambiguïté sur ce sujet, je me permets de vous rappeler brièvement la position de la CGT et les actions qu’elle mène, aussi bien en faveur de la paix entre les peuples israéliens et palestiniens que de la liberté d’expression des militants du BDS en France.
Ces actions s’inscrivent dans la solidarité de la CGT à l’égard des travailleurs de tous les pays et en faveur de la paix dans le monde. Elles partent du constat de la situation dramatique de la Palestine qui s’enracine dans l’occupation illégale des territoires conquis par Israël et le renchérissement de sa politique de colonisation. La CGT a toujours œuvré aux côtés de celles et de ceux qui se mobilisent pour la paix, en Israël comme en Palestine. Elle entretient des contacts syndicaux avec les travailleurs de cette région et c’est en lien avec ces organisations syndicales qu’elle recherche les moyens les plus efficaces et participe aux campagnes en faveur d’une paix juste et durable au proche-orient.
C’est le sens de la délégation conduite par Bernard THIBAULT en février 2013 en Palestine, à Gaza et en Israël.
Forts de cette approche, nous considérons que le boycott global d’Israël ne favorise pas cette stratégie de paix et la coexistence de deux Etats, l’Etat Palestinien et l’Etat d’Israël. Par contre, la CGT s’inscrit totalement dans la campagne d’interdiction des produits fabriqués dans les colonies et dans l’obligation de transparence sur l’origine des produits israéliens destinés à l’exportation afin que l’Etat d’Israël soit contraint de respecter le droit international.
Enfin, je vous rappelle que la CGT, par la voix de Bernard THIBAULT, alors Secrétaire général, est signataire de l’appel initié par Stéphane HESSEL pour la relaxe des militants poursuivis pour leur participation à des actions de boycott. Ce soutien a été renouvelé le 17 décembre dernier, par une délégation de la CGT, de la LDH, de l’AFPS et de parlementaires auprès de la Ministre Christiane TAUBIRA demandant le retrait des circulaires Alliot-Marie et Mercier.
Je tiens à vous préciser que je rendrai ce courrier public et vous prie d’agréer, Monsieur le Président, mes salutations distinguées.
Thierry LEPAON
Secrétaire général de la CGT