Pas de trêve des confiseurs pour le mouvement de solidarité avec la Palestine. Il faut dire que le vent semble tourner en sa faveur. Après le fiasco stratégique de l’armée israélienne à Gaza et la reconnaissance de la Palestine comme Etat observateur à l’ONU, une cinquantaine de personnalités, dont plusieurs Prix Nobel, ont exigé un embargo militaire sur Israël. Et autant de footballeurs européens ont exprimé leur soutien au boycott de la coupe du monde des moins de 21 ans, qui doit se tenir en Israël cette année.
Un article récent de Haaretz déplore la mauvaise image internationale grandissante d’Israël et, dans ce contexte, de nombreux artistes ne veulent pas y être associés. Après Cat Power et Cassandra Wilson en 2012, c’est Stevie Wonder qui a annulé in extremis, fin novembre, sa participation à un gala des Amis des Forces armées israéliennes, prévu à Los Angeles.
Autant dire qu’à l’annonce de la participation de plusieurs artistes de renommée internationale au prochain Red Sea Jazz Festival d’Eilat en Israël (du 17 au 19 janvier), les militants pro-palestiniens, qui sont aussi des fans de musique, ont pris leurs plumes et activé leurs réseaux sociaux. Les Britanniques écrivent au Portico Quartet, les citoyens étasuniens écrivent à Stanley Jordan, les Français et les Suisses à Erik Truffaz, les Hollandais à Yuri Honing, les Français également à JackyTerrasson et les Brésiliens à Benjamin Taubkin. Les premiers à répondre,favorablement, sont les membres du Portico Quartet, qui déclarent sur leur page Facebook: «Vu les récentes actions du gouvernement d’Israël et, en particulier, la construction de 3000 nouveaux logements dans la zone E1, nous ne nous sentons plus capables de jouer au Red Sea JazzFestival (…). Nous appelons les autres artistes à rejoindre la campagne Boycott, Désinvestissements et Sanctions (BDS).» Stanley Jordan adopte la méthode suivie par Macy Gray en 2011 et demande à ses fans sur Facebook ce qu’ils en pensent. Un débat extrêmement animé s’ensuit, y compris après qu’il a annoncé sa décision de se rendre en Israël, tout en promettant de donner un concert de sensibilisation aux Etats-Unis au profit des Palestiniens. A Jane Birkin, qui avait peu ou prou fait la même proposition et qui n’a pas tenu sa promesse à ce jour , les Palestiniens ont répondu par une fin de non recevoir: lasituation n’est pas symétrique, et ils réclament la justice, pas la charité. Pour la petite histoire, Macy Gray avait finalement donné son concert en Israël, avant de regretter publiquement sa décision…
Le groupe Tuba Skinny, les artistes Jason Moran et Eddie Palmieri avaient annulé leur participation à l’édition 2011 du Red Sea JazzFestival, qui se tient dans une station balnéaire bien éloignée de la politique, mais qui est financé par le Ministère israélien de la culture et du tourisme. Erik Truffaz n’a pas encore répondu aux courriers qui lui sont parvenus de Genève et de Paris, mais qu’il déçoive ses fans ou non, l’agitation créée profite aux Palestiniens. Elle fait connaître la campagne BDS et ses trois revendications: la fin de l’occupation, de la colonisation, du blocus de Gaza et le démantèlement du Mur; la fin de l’«apartheid» pour les Palestiniens israéliens; le droit au retour pour tous les réfugiés.
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