Par Ali Abunimah vendredi 06/06/2014
La multinationale anglo-danoise de sécurité et de protection des prisons G4S s’apprête à se retirer complètement des prisons israéliennes relate ce matin le Financial Times.
Les militants ont accueilli prudemment cette nouvelle, mais insistent sur le fait que la pression sur la société doit continuer jusqu’à ce que cessent les abus dont elle est complice. Ils remarquent que, dans le passé, G4S a fait des déclarations trompeuses.
Selon le Financial Times :
G4S a confirmé qu’elle allait mettre fin à tous ses contrats avec les prisons israéliennes dans les trois prochaines années, après une assemblée générale annuelle sévèrement perturbée par des protestataires des droits de l’Homme. Interrogée par des protestataires en colère sur la question de savoir si G4S se retirerait des territoires palestiniens comme le disait le Financial Times l’an dernier, Ashley Almanza, administrateur en chef, confirma « pas de changement sur cette position ».
« Nous attendons qu’ils arrivent à expiration et nous n’avons pas l’intention de les renouveler », dit-il. Y sont inclus les contrats de fourniture d’équipements de sécurité et de protection pour les checkpoints militaires, la très controversée prison d’Ofer et un poste de police en Cisjordanie, qui tous sont supposés expirer l’an prochain.
Mais M. Almanza a dit pour la première fois que ce désengagement comprendrait aussi les contrats avec le service des prisons partout en Israël.
Avertissement
« G4S ressent sûrement la pression et les atteintes à sa réputation causées par la campagne internationale contre sa complicité dans l’occupation militaire israélienne », a dit Randa Wahbe, principal avocat de l’association Addameer de soutien aux prisonniers et des droits de l’Homme, dans une déclaration envoyée à l’Intifada Electronique.
« Les dernières nouvelles comme quoi G4S ne renouvellera pas son contrat avec le service pénitentiaire israélien est une étape bienvenue, mais ceci n’a pas d’effet immédiat sur ceux qui affrontent aujourd’hui les violations des droits de l’Homme dans les prisons israéliennes. »
« G4S est depuis longtemps championne dans le fait de dire une chose pour en faire une autre et n’a fait aucune déclaration écrite officielle à propos du moment où elle a l’intention de mettre fin à ses contrats avec le service pénitentiaire israélien et d’autres aspects du régime d’apartheid israélien. »
« La campagne contre G4S se poursuivra jusqu’à ce que la société mette vraiment fin à tous les contrats qui soutiennent l’occupation militaire israélienne. »
La Campagne de Solidarité avec la Palestine ajoute que « on continuera à cibler G4S tant qu’elle n’aura pas mis fin à sa complicité avec les crimes israéliens. »
« Du sang sur les mains »
Malgré sa décision apparente de se retirer, la société répète qu’elle n’a aucun rôle dans les abus commis par Israël.
« Nous ne gérons pas les prisons, nous fournissons aux prisons les équipements de sécurité », a dit Almanza au Financial Times, prétendant que ces équipements rendaient les prisons « plus sûres » mais sans faire augmenter les atteintes aux droits de l’Homme.
Mais comme l’explique cette vidéo d’Addameer, G4S a « du sang sur les mains » en fournissant des systèmes de surveillance et d’autres services à des sites comme la prison de Megiddo où Arafat Jaradat, père de trois enfants, a été torturé à mort l’an dernier, et où l’adolescent palestinien Ali Shamalawi, l’un des « Hares Boys » (Garçons Pourchassés) est détenu.
Pression accrue
Le 5 juin à Londres, des douzaines de militants ont perturbé l’assemblée annuelle des actionnaires de G4S, et 25 d’entre eux ont été éjectés de force, alors que beaucoup plus manifestaient à l’extérieur.
La vidéo ci-dessus, tournée pendant la réunion, montre des militants criant très fort « G4S honte à vous ! » et énonçant les abus de la société, y compris son rôle dans les dommages et la détention infligés à des demandeurs d’asile et des migrants au Royaume Uni et pour l’Australie. (Trois vigiles de G4S ont été accusés d’homicide involontaire après la mort en 2010 de Jimmy Mubenga qu’ils détenaient lors de son expulsion forcée du Royaume Uni.)
Une autre vidéo envoyée par le collectif de militants Stop G4S sur sa page Facebook en montre un peu plus sur l’action à l’intérieur de l’assemblée des actionnaires.
Cette nouvelle arrive aussi après que nombre d’artistes renommés, de militants et de politiques aient publiquement appelé G4S à mettre fin à sa complicité dans les atteintes d’Israël contre les enfants prisonniers.
Il y a l’archevêque Desmond Tutu, Ahmed Kathrada politique Sud-africain et ancien prisonnier politique, Alice Walker, Roger Waters, Angela Davis, Breyten Breytenbach, Saleh Bakri et un certain nombre de membres du parlement britannique.
En plus des protestations, G4S se retrouve aussi sous pression officielle. Plus tôt cette semaine, comme le relate le Financial Times, « le Point de Contact National de surveillance du gouvernement britannique a lancé une enquête sur les activités de G4S en Israël et en Cisjordanie. Le Point de Contact National, qui fait partie du Département des Affaires Commerciales, a dit qu’ils avaient ‘accepté la poursuite de l’enquête’. »
Ceci fait suite à une plainte en règle d’avocats pour les droits fondamentaux des Palestiniens qui ont salué la démarche du département commercial comme étant « une importante ouverture ».
La semaine dernière, on a révélé que la Fondation Bill Gates avait écoulé une part importante de ses actions G4S suite aux critiques sur son investissement dans la société.
Les derniers développements montrent clairement que même une aussi grande entreprise que G4S –elle a plus de 600.000 employés dans le monde- ne peut continuer à profiter des souffrances et dommages infligés à des êtres humains sans ressentir la pression exercée par des militants engagés.
Traduction : J.Ch.