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01/04/14

Développement du boycott et transformations du mouvement de solidarité par l’appel BDS

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José Luis Moraguès, membre de la coordination nationale CCIPPP et de BDS France.

1- LES CONDITIONS D’ÉMERGENCE DE LA CAMPAGNE BDS EN EUROPE

– QUELQUES INITIATIVES BDS ISOLÉES (2002 A 2008)

En août 2002 le PACBI [1] lance un premier appel pour « un boycott économique, culturel et universitaire d’Israël ». Le 28 septembre 2002 à Marseille (France),10 000 personnes défilent lors d’une « Grande marche internationale, pour la protection du peuple palestinien, contre l’occupation, la colonisation, l’apartheid en Palestine et pour le boycott des produits israéliens». La manifestation marchera sur le « quai Carmel » où les bateaux de l’entreprise israélienne Agrexco/Carmel débarque ses produits (fruits et légumes ). Lors d’une communication téléphonique en direct avec Arafat assiégé, celui-ci remerciera chaleureusement les manifestants de leur solidarité. La reprise du « boycott » exprime ici davantage un cri de colère et une volonté de réagir face l’invasion, fin mars 2002, de la Cisjordanie et Gaza par l’armée israélienne qu’il n’est le résultat d’une analyse et d’un projet solidement construit. Mais l’idée fait son chemin, notamment au Royaume-Uni où en 2004 les activistes bloquent l’entrée du dépôt du centre d’emballage Agrexco/Carmel à Hayes dans le Middlesex. Le procès intenté par Agrexco contre les activistes (plainte classée sans suite) est célèbre car le directeur d’Agrexco a reconnu, devant le tribunal, que l’entreprise israélienne produisait dans les colonies de la Vallée du Jourdain. Ce qui a constitué un point d’appui pour la dénonciation d’Agrexco dans toute l’Europe.

L’idée du boycott des institutions universitaires est reprise en octobre 2003 par des universitaires et des intellectuels palestiniens des territoires occupés et de la diaspora mais sans résultat.

En avril 2004 le PACBI lance un nouvel appel au boycott universitaire et culturel d’Israël. Dès 2005, au Royaume-Uni, les syndicats universitaires (AUT) votent pour le boycott malgré l’offensive sioniste visant à les faire condamner. Pendant quelques années ils n’utiliseront pas le mot « boycott » tout en maintenant une activité de boycott.

En juillet 2005 grâce à un travail acharné du PACBI, PNGO [2], Stop the Wall, des organisations de Réfugiés et quelques autres organisations est lancé « l’Appel BDS » palestinien. Alors que cet appel est signé de 172 organisations représentant tous les courants politiques, religieux et l’immense majorité des associations de la société civile palestinienne, à de rares exceptions près, il ne rencontre aucun écho immédiat dans le mouvement de solidarité à la Palestine. L’émotion et la colère de l’invasion de 2002 sont retombées et en France, par exemple, face à la propagande sioniste qui brandit la menace de poursuites pour antisémitisme, l’idée de boycott a reculé y compris parmi les plus radicaux au sein du mouvement de solidarité. Deux arguments majeurs sont avancés : le Boycott évoque trop directement le boycott des magasins juifs par les nazis et, contrairement aux USA, nous n’avons pas la culture des actions de consommateurs.

– L’ÉLECTROCHOC DE LA GUERRE ISRAÉLIENNE CONTRE LA BANDE DE GAZA

La guerre contre Gaza de l’hiver 2008-2009 engendre une exigence d’actions contre Israël.

Avant même la trêve du 18 janvier 2009, les centaines de milliers de manifestants remplis de colère et galvanisés par le succès de leurs mobilisations sont en demande de propositions pour sanctionner Israël. On assiste alors à une série d’initiatives qui spontanément mettent en œuvre des types d’actions préconisées par l’appel BDS palestinien :

– Dès la première semaine de janvier 2009 les syndicats norvégiens appellent à des grèves contre les massacres commis. Certains demandent le retrait des investissements norvégiens en Israël, d’autres exigent de leurs employeurs qu’ils retirent les produits israéliens des magasins privés et publics du pays…

– le 10 janvier les dockers grecs bloquent des munitions US à destination d’Israël dans le port d’Astakos.

– Le même jour Naomi Klein publie dans The Guardian un long article intitulé « Ca suffit. Le temps du boycott est venu ».

– Le 20 janvier la CGT d’Alsthom en France réclame que l’entreprise cesse sa collaboration avec Israël dans la construction du tramway à Jérusalem.

– Le 22 janvier une dizaine d’universités britanniques y compris Oxford sont occupées pour que cesse la collaboration avec Israël.

– Le 23 janvier c’est l’université de Parme qui est occupée pour protester contre la collaboration avec la firme américaine Caterpillar, qui fournit des bulldozers à l’armée israélienne. Puis ce sera celle de Milan.

Ce mouvement va s’amplifier dans toute l’Europe et s’épanouir dans la réponse à l’appel BDS palestinien.

La guerre contre Gaza signe la fin du « processus de paix ». Par delà la violence des bombardements intensifs, jours et nuits contre une population civile terrifiée, par delà les 1340 morts dont 430 enfants, les milliers d’adultes et enfants blessés et handicapés à vie, la barbarie israélienne fait tomber les masques et accélère les prises de conscience. Le monde entier découvre que le nettoyage ethnique est une politique d’Etat et donc qu’Israël ne veut pas « la paix ». Cette révélation signe la fin de la période ouverte par les Accords d’Oslo, signe la mort du prétendu « processus de paix » .

Force est de constater que celui-ci a été utilisé, par l’axe israélo-étatsunien et avec la complicité active de l’Union Européenne, comme une arme de guerre pour « continuer 48 » c’est à dire : intensifier le nettoyage ethnique. Que sur la scène internationale, il a réussi à imposer idéologiquement, en faveur d’Israël, le rapport de force établi militairement par l’état israélien et ses colons sur le terrain.

La fin politique des Accords d’Oslo sanctionne également l’impasse d’un système mis en place par l’Autorité Palestinienne. On peut considérer que la division Autorité palestinienne/Hamas était un élément de ce système qui octroyait à l’Autorité Palestinienne la « Légitimité » permettant les financements extérieurs et qui octroyait au Hamas, l’exercice d’un pouvoir sur la Bande de Gaza.

Dans ce contexte de révolte face à la barbarie et de prise de conscience de la tromperie du « processus  de paix » les derniers tabous sur le boycott volent en éclat. Les propositions de boycott de l’appel BDS palestinien contre Israël s’imposent dès lors comme une évidence d’action. Le mouvement de solidarité s’empare enfin de l’appel BDS.

– DÉPLOIEMENT ET ORIENTATIONS DE LA CAMPAGNE BDS EUROPÉENNE [3] (2009 – 2013)

2009 – 2011 Les actions de boycott dominent dans le BDS

Durant ces deux années l’appel BDS est perçu en Europe, avant tout comme une modalité d’action et une modalité d’action centrée sur le Boycott des produits israéliens dans les grandes surfaces. La référence à l’Afrique du Sud (cf. les oranges Outspan) semble avoir induit dans plusieurs pays l’idée que boycott signifiait « boycott des produits ». Ainsi les avocats remplaceraient les oranges et ce dans une démarche individuelle de boycott.

Ce qui caractérise ces actions de boycott inspirées des thèses de la non violence c’est leur caractère audacieux et en rupture complète avec le type d’action d’avant la guerre contre Gaza. (Cf. cette action de boycott du 7 février 2009 au Pays de Galles

http://www.youtube.com/watch?gl=GB&hl=en-GB&v=f729KqURQc4). Un saut qualitatif est franchi : les actions sont passées de la dénonciation et de la protestation par délégation : nous demandons aux élus, aux instances etc. de refuser tel produits etc. à l’action directe : nous, citoyens, allons en personne dans les magasins mettre en acte notre refus des produits et des entreprises incriminées et nous nous adressons directement au public et aux directeurs des supermarchés.

L’action phare qui a marqué ces deux années est la campagne contre Agrexco menée par la Coalition contre Agrexco. Initiée à Montpellier en raison d’une décision du Conseil Régional Languedoc-Roussillon de construire, dans le Port de Sète, des entrepôts réfrigérés afin de recevoir les fruits et légumes israéliens débarqués des bateaux d’Agrexco, cette campagne a pris en six mois d’existence une dimension européenne. Pendant deux ans et demi, la Coalition contre Agrexco a été un laboratoire du BDS et la matrice du BDS Européen. En juillet 2011 l’entreprise déclarait faillite et la liquidation était prononcée le 11 septembre 2011. La baisse des parts de marché en Europe a provoqué des difficultés de trésorerie qui ont déclenché une série de problèmes lesquels ont conduit à la faillite. C’est la première victoire européenne de boycott contre un fleuron historique de l’agriculture coloniale israélienne ; celle qui « faisait fleurir le désert » (avec l’eau et sur la terre des palestiniens ( !). )

2010 – 2013 structuration et orientation du BDS sous direction palestinienne.

Durant ces trois années le BNC a encouragé l’ouverture de nouveaux fronts d’intervention BDS, sur les terrains culturel, académique et sportif. Concernant le boycott économique qui nous intéresse ici, on retiendra un double mouvement dans la présence palestinienne. Une progression constante de l’implication des organisations paysannes palestiniennes dans la campagne européenne de boycott et l’affirmation respectueuse mais ferme des positions stratégiques palestiniennes.

La campagne contre Agrexco a été menée en lien direct et permanent avec le BNC qui à plusieurs reprises a envoyé des messages de soutien dans des situations critiques. Pour la première fois le PARC [4] va s’impliquer directement, en France, dans le boycott d’Agrexco. Pour casser le boycott, la direction d’Agrexco (appuyée par les officines sionistes en France) avait annoncé un arrivage massif de fraises de Gaza exportées par Agrexco. Boycotter ces fraises serait boycotter les Palestiniens de Gaza il fallait donc cesser le boycott d’Agrexco, telle était en substance la manoeuvre israélienne. Le 30 décembre 2010 le PARC ripostait « (…) PARC confirme son soutien au boycott de toutes les compagnies complices de la violation de la loi internationale, dont Agrexco. (…) A cette occasion, PARC salue tous-te-s les militant-e-s et soutiens internationaux de la campagne BDS, et particulièrement nos amis et partenaires Français qui ont été capables de contrarier la tentative par Agrexco d’organiser … etc. ».

– Passer du boycott des produits au boycott des entreprises

Après la victoire contre Agrexco, la désignation de la nouvelle cible (Mehadrin [5]) s’est faite en concertation avec le BNC et la coordination BDS européenne (Novembre 2011). Il y a dans le choix d’une cible principale l’affirmation qu’il est nécessaire de concentrer les tirs du boycott au lieu de disperser les forces sur une quantité de cibles. Il y a également la volonté affichée de poursuivre la démarche d’Agrexco qui était de cibler l’entreprise et non les produits. L’Appel BDS de 2005 ne rentre pas dans les détails, il ne se prononce pas sur le boycott des produits ou des entreprises, par contre l’Appel palestinien du 9 février 2013 [6] et le texte « Farming injustice » [7] publiés un peu plus d’un an après la victoire contre Agrexco apportent des réponses plus explicites sur le sujet. Le texte « Farming injustice » qui développe l’argumentaire de l’appel montre comment l’agriculture de l’ensemble de la Cisjordanie et Gaza (sans oublier les pêcheurs) est victime du système colonial israélien. Les signataires : toutes les organisations paysannes, celles de la société civile palestiniennes sous occupation militaire et le BNC, appellent à « cesser tout commerce avec les Entreprises agroalimentaires Israéliennes ». Les cibles sont nommées : sept entreprises agroalimentaires dont une cible prioritaire Mehadrin, suivie de Hadiklaim [8]. L’objectif est également fixé : la fin de tout commerce complice avec ces entreprises qui causent la destruction de l’agriculture palestinienne ([9]).

– Pour l’interdiction d’entrée dans l’UE des produits des colonies

En ciblant les entreprises agricoles israéliennes l’appel de 2013 réaffirme son alignement stratégique sur le droit international, notamment en matière des colonies. Il refuse de prendre pour base de discussion les accords UE-Israël qui sont le résultat du rapport de force issu d’un « processus de paix » au service de la domination et de l’apartheid israélien. Non seulement les accords UE-Israël n’appliquent pas le droit international mais ils le violent souvent. Quand les produits des colonies clairement identifiés entrent en Europe après le simple paiement d’une taxe, au lieu d’être bloqués aux frontières et confisqués comme les produits de contrefaçon, il s’agit tout simplement d’une violation du droit. « Farming injustice » rappelle que les colonies sont illégales, que leur construction et le déplacement de population constituent un crime de guerre, donc que leurs productions sont illégales et a fortiori le commerce avec les entreprises qui produisent et/ou commercialisent ces produits.

« Farming injustice » se prononce aussi sur l’étiquetage. L’étiquetage [10] des produits des colonies et le choix laissé au consommateur d’acheter ou non ces produits dans les magasins européens constituent également une violation du droit. Comme l’écrivent les signataires de l’appel de 2013 : « Tout commerce avec des entreprises agissant ou impliquées dans des colonies illégales israéliennes soutient la pérennité des colonies. (…) Le maintien des échanges commerciaux avec les entreprises opérant dans les colonies illégales accorde de facto une reconnaissance et une légitimité politique aux colonies. » (Farming injustice p.16). Même si c’est pour appeler à leur boycott ensuite, l’étiquetage des produits des colonies en ne s’opposant pas à leur entrée en UE, légalise de fait leur commercialisation. La seule réponse de droit est l’interdiction d’entrée de ces produits et le refus de commercer avec les entreprises israéliennes qui les produisent et/ou les commercialisent.

La nature des interventions du BNC via les différents canaux (dans la coordination européenne, par ses articles, vidéos, et site [11]) qui toutes martèlent les orientations stratégiques de l’appel de 2005 et ses objectifs fondamentaux ont fini par redonner au BDS toute son épaisseur. La prise en compte progressive de la dimension stratégique de l’appel BDS va transformer radicalement le mouvement de solidarité [12].

2 – L’APPEL BDS  : UNE ALTERNATIVE STRATÉGIQUE ET DES MODALITÉS D’ACTIONS QUI TRANSFORMENT RADICALEMENT LE MOUVEMENT DE SOLIDARITÉ AVEC LA PALESTINE.

L’appel BDS comporte deux volets :

  • Une alternative stratégique qui définit les conditions minimales pour une réelle autodétermination du peuple palestinien. Le mouvement de solidarité a désormais un nouveau cadre politique cohérent, basé sur les droits fondamentaux des trois composantes du peuple Palestinien. Un cadre stratégique, riche de perspectives et alternatif aux solutions politiques issues des accords d’Oslo. [13]
  • Une alternative tactique d’actions pour le mouvement de solidarité, indissociables des trois objectifs stratégiques
    Dans cette dernière partie nous traiterons des transformations que la prise en compte et la mise en œuvre de ces deux volets de l’appel BDS ont engendré dans le mouvement de solidarité. L’expérience de la lutte contre Agrexco sera le fil conducteur pour illustrer ces transformations.

–       Une direction palestinienne impliquée dans l’action

Dans l’avant BDS on avait surtout recours aux Palestiniens en tant que témoins et victimes. Nous leur demandions de raconter les horreurs de la colonisation israélienne et ses crimes pour mieux les dénoncer. Dans la campagne BDS les Palestiniens sont non seulement acteurs mais garants des orientations stratégiques d’une campagne dont ils revendiquent légitimement la direction.

Dans la lutte contre Agrexco l’implication palestinienne s’est faite dès la première rencontre ([14]). A Ramallah O. Barghouti nous a dit que le BNC[15] voulait donner une dimension européenne à la bataille contre Agrexco et qu’il allait activer ses contacts en Europe. Il ne s’agissait pas seulement d’un conseil extérieur mais d’une implication immédiate et directe dans la réalisation de cet objectif. Trois mois après cette rencontre, au premier grand meeting de la Coalition contre Agrexco le 10/10/09 ([16]) non seulement Omar Barghouti était présent mais également les écossais : Terry Brotherstone, du syndicat STUC ; Mick Napier, Sofiah Macleod de SPSC (Scottish Palestine Solidarity Campaign) et les italiens de : « Coalitione contro l’Agrexco », Carlo Tombola (TRANSARMS EUROPE), Alfredo Tradardi (ISM), Diana Larminati (ISM). A la réunion du lendemain on a jeté les bases de la construction d’une coordination Européenne contre Agrexco. Quelques mois après le BNC ouvrait sur son site (www.bds.movement.net) une page spéciale pour la Campagne contre Agrexco (http://www.bdsmovement.net/activecamps/agrexco). La CCA[17] a pris l’initiative du Forum Européen des campagnes contre Agrexco ([18]) en lien avec tous nos contacts européens et bien sûr le BNC. Les personnes présentes au Forum on pu mesurer l’implication directe de la palestinienne Rafeef Ziadah, représentante du BNC et de Michael Daes, coordinateur du BNC pour l’Europe. Il-elle ont animé très activement ateliers, meeting etc. et directement contribué au succès du forum, à la création de la coordination Européenne contre Agrexco. Depuis, ils poursuivent ce travail au sein de la coordination européenne. Les interventions directe du BNC dans la lutte elle même ont été nombreuses, une dizaine en un peu plus de deux ans. La plupart du temps pour appuyer une initiative et ainsi la créditer du soutien palestinien.

– S’adresser à l’ensemble de la société civile : Réduire la cible et ouvrir toutes les « portes d’entrées » dans la coalition :

Parce que nous voulions gagner contre Agrexco et pas seulement dénoncer les agissements de cette entreprise il fallait mobiliser très au delà des associations de solidarité à la Palestine.

Pour rassembler le maximum d’organisations et d’individus il fallait réduire la cible et ouvrir ce que nous avons appelé « les portes d’entrées » dans la coalition. La cible c’est le refus d’Agrexco. Il suffit qu’une association partage un seul des arguments énoncés dans l’Appel initial de la Coalition contre Agrexco, pour y avoir sa place. Pour rassembler, l’Appel de la Coalition à l’image de celui du BNC se réfère aux valeurs et droits fondamentaux sur la base du droit international et non aux solutions politiques et institutionnelles. Ainsi la proposition d’inclure dans l’appel la revendication des deux états a été écartée. Elle aurait créé des clivages, fermé la porte à certaines associations mais surtout, parce elle remplaçait une cible concrète à portée de main (Agrexco) par une cible abstraite et hors de portée de notre action (un état palestinien).

A l’inverse nous avons encouragé l’expression des spécificités de l’engagement des uns et des autres, et considéré qu’il n’y avait pas de hiérarchie dans ces engagements. Chaque motif de refus d’Agrexco, ou de soutien aux Palestiniens fût-il partiel étant d’égale valeur. [19]

Ainsi les portes d’entrées dans la coalition étaient nombreuses et diversifiées : le BDS ; le respect du droit international ; le respect des droits humains, qui mobilise les associations des droits de l’homme ou des réfugiés ; mais aussi l’avenir des paysans dans le monde, l’emploi local des Sétois et l’emploi régional des paysans, les dégâts de l’agrobusiness, la sécurité et la souveraineté alimentaires, la nature des échanges commerciaux, l’environnement, la décroissance, l’écologie, le commerce éthique. Et la non violence, à la fois en tant que stratégie et méthode qui inspire toutes nos actions.

– Entrainer dans l’action la diversité des organisations signataires : Passer de la solidarité exogène à l’action directe ici, contre Israël, ses représentants et ses complices.

Avant le BDS, dans le soutien à la Palestine et comme nous ne vivons pas la réalité des palestiniens on considérait que le problème était « là-bas » et on développait une solidarité qu’on peut qualifier d’exogène, c’est à dire apportée de l’extérieur pour des problèmes extérieurs aux nôtres (vol de terres, assassinats, Mur etc.). Les cibles étaient toujours « là-bas » à des milliers de km. « Ici », au mieux on dénonçait la complicité de notre gouvernement et/ou de l’UE.

La question s’est posée de comment allions-nous, non seulement sensibiliser mais entraîner dans l’action les organisations signataires et les pans entiers de la société civile favorables aux Palestiniens.  Pour cela nous sommes partis, non pas des revendications des Palestiniens en vue de les faire partager par les organisations ici en France, ce qui est la démarche habituelle des associations de solidarité, mais à l’inverse nous sommes partis des campagnes, des actions, des luttes, des revendications menées par les organisations signataires ici, en essayant de voir ce qu’elles pouvaient avoir de commun avec celles des Palestiniens. Nous avons repéré et identifié les thématiques et surtout les VALEURS qui animent les luttes en France et nous avons invité les organisations à trouver dans ces valeurs, les raisons et les motifs de refus à l’installation d’Agrexco dans le port de Sète. Les organisations sont entrées en lutte contre Agrexco sur la base des valeurs qui portaient déjà ici leurs propres actions. En luttant contre Agrexco elles luttaient pour leurs propres revendications. Elles ne luttaient pas « pour » les palestiniens à des milliers de km, mais elles luttaient « avec » les Palestiniens malgré les milliers de km.

 

L’appel BDS palestinien a commencé à transformer radicalement le mouvement de solidarité. La Campagne BDS marque la fin de la période idéologiquement contaminée par l’attentisme et les impasses des accords d’Oslo définitivement enterrés par la guerre contre Gaza.

La solidarité avec les Palestiniens passe désormais par la lutte active et ouverte, l’action directe, menée avec les Palestiniens, dans chacun de nos pays, contre toute présence, manifestation et expression de l’Etat d’Israël, de ses représentants et de ses complices.


[1] PACBI : Campagne Palestinienne pour le boycott académique et culturel d’Israël

[2] PNGO : Réseau des ONG Palestiniennes

[3] Comme le lecteur l’aura deviné, cet article, est centré sur le boycott dit économique dans le domaine agroalimentaire, requalifié depuis l’appel palestinien de 2013 : « Contre le commerce avec les entreprises agroalimentaires israéliennes » (Cf. la brochure palestinienne : « Farming injustice » http://www.bdsmovement.net/activecamps/farming-injustice.)

PARC :Comités de soutien à l’agriculture palestinienne. Le PARC, historiquement proche de l’Autorité Palestinienne est l’ONG la plus importante dans le domaine agricole, http://www.pal-arc.org/

[5] Mehadrin, déjà concurent d’Agrexco a profité de la liquidation d’Agrexco dont il a pris la place de leader en Israël et dans l’exportation.

[8] Coopérative spécialisée dans la production et exportation de dattes (Vallée du Jourdain en particulier).

[9] Voir la vidéo : « Pour le boycott des entreprises agricoles israéliennes » Omar Barghouti : http://www.youtube.com/watch?v=6CTpbe-sOBU

[10] Préconisé en France par la « Plateforme des ONG pour la Palestine ». Lire aussi l’excellent article « Etiquetage ou interdiction des produits des colonies ? » de Christophe Perrin : http://www.mehadrindegage.org/content/etiquetage-ou-interdiction-des-produits-des-colonies-0

[12] En retour les succès du BDS, par effet boomerang reviennent en Palestine et accélèrent la pénétration des objectifs stratégiques de l’Appel dans le peuple palestinien réunifié.

[13] Le contenu de ce volet fondamental, développé dans d’autres articles du présent ouvrage ne sera pas davantage développé ici.

[14] Une mission spécifique est allée en Palestine enquêter sur Agrexco dans la Vallée du Jourdain, a rencontre les syndicats palestiniens et bien sûr le BNC. Egalement Who profits l’ONG israélienne.

[15] BNC : Comité National Palestinien du BDS

[16] « 8h pour la Palestine : Contre Agrexco et pour l’emploi » Maison des syndicats Montpellier.

[17] CCA : Coalition contre Agrexco.

[18] Forum européen des campagnes contre Agrexco, 4/5 juin 2011 Montpellier.

[19] Un an après sa création la Coalition contre Agrexco comptait 100 organisations signataires dont 60% d’organisations nationales en France.