Compte rendu de l’atelier BDS France des 14/15 janvier 2012 à Lyon
(1re partie : Quelques enseignements de la bataille contre Agrexco. (José Luis Moraguès BDSF)
(2ème partie : Dimension européenne de la campagne BDS contre Agrexco (Michaël Deas – BNC)
texte non remis.
QUELQUES ENSEIGNEMENTS DE LA CAMPAGNE CONTRE AGREXCO EN France :
Pour comprendre le succès de la CCA en France il faut prendre en compte 3 éléments majeurs.
1 – Le Contexte international et Régional (Languedoc Roussillon)
2 – La pertinence de l’Appel du BNC
3 – L’implication directe du BNC dans la bataille
Et vous allez me dire et nous alors on n’a rien fait ? Si bien sûr mais le mérite de la CCA et de tous ceux et celles qui ont participé aux diverses actions locales ou nationales, notre mérite c’est celui d’avoir compris très vite, dès mars 2009 l’importance stratégique de l’Appel du BNC, de l’avoir adopté et de l’avoir soutenu et appliqué contre vents et marées, contre toutes les tentatives de sabotage externes et les entraves internes à la CCA.
C’est ce qui me fait dire avec enthousiasme que la victoire contre Agrexco, c’est d’abord et surtout la victoire des choix politiques du BNC.
1 – Le Contexte international/national et Régional (Languedoc Roussillon)
Le contexte international est celui de l’après-Gaza. Gaza a été tout à la fois le révélateur, le déclencheur et la force de révolte qui a donné naissance au BDS en France.
Gaza a révélé à ceux qui en doutaient encore que le processus de paix issu des accords d’Oslo a été utilisé par Israël comme un moyen pour développer la colonisation, l’occupation et l’apartheid. Gaza a révélé qu’Israël ne veut pas la paix et qu’il n’y a pas de compromis historique possible dans ces conditions.
Face à cette impasse incontestable (à chaud du moins), la majeure partie du mouvement de solidarité s’est tourné vers l’appel BDS qui ne l’oublions pas attendait depuis 2005 qu’on s’en empare !
Gaza a fourni la révolte, l’énergie et les forces qui ont trouvé dans les actions de boycott un débouché logique et cohérent aux mobilisations de la Guerre contre Gaza. Ça c’est le contexte international et national.
Sur le plan régional 3 éléments marquant :
– Une cible indéfendable : G. Frêche tout frétillant de la « victoire israélienne » contre Gaza a annoncé sa volonté de faire d’Israël le partenaire privilégié de la Région en accueillant Agrexco à Sète. Remercions le, car d’un seul coup il nous a offert en une seule cible : Israël et Agrexco.
– La personnalité sioniste de G. Frêche, détestable et détesté pour des tas d’autres raisons.
– Et les élections régionales en avril 2010, avec cerise sur le gâteau une opposition à Frêche de l’extrême gauche à y compris le PS « officiel ». Ce qui explique les nombreuses adhésions à la CCA qui était opposée au projet Régional de G. Frêche.
La mise en synergie de ces deux contextes a permis le développement rapide et dans l’action de la CCA. Rappelons aussi que 6 mois à peine après la création de la CCA, BDSF sortait une affiche et faisait de la campagne contre Agrexco sa campagne principale de boycott.
Ce contexte politique et idéologique favorable a facilité la mise en œuvre de l’appel BDS du BNC.
2 – La pertinence de l’Appel du BNC
Je ne retiendrais ici que trois traits caractéristiques de cet appel :
1- Le « dialogue » a échoué, on passe à l’attaque !
2- La cible c’est Israël, en tant qu’état raciste et d’apartheid et tous ses représentants.
3 – C’est avant tout dans chaque pays que les sociétés civiles doivent se battre contre Israël et ses complices.
1– Le « dialogue » a échoué, on passe à l’attaque !
Même si ce n’est pas dit explicitement, cet appel s’inscrit en faux contre Oslo et son pseudo processus de paix. Il constate l’échec de TOUTES les démarches institutionnelles et donc de fait, celles du processus de paix, du Quartet etc. et en remettant à l’ordre du jour les Réfugiés et les palestiniens d’Israël qui sont les oubliés du processus de paix, il affirme que le contenu négociations doit porter sur les droits fondamentaux, mettant sur la touche les solutions étatiques (un état deux états etc.)
Donc l’appel BDS annonce un renversement de stratégie et appelle le mouvement de solidarité à adopter ce renversement. On est passé de la critique de la politique israélienne d’un gouvernement à la critique de l’état d’Israël. On ne critique plus pour convaincre le « partenaire » de respecter le contrat et en vue de le ramener dans le droit chemin, il n’y a pas de dialogue possible tant qu’Israël ne reconnaît pas ses crimes. Autrement dit, on passe à l’attaque et on se bat pour gagner. Le lobyyng n’est plus à l’ordre du jour, c’est la création d’un rapport de force qui est à la base de toute action entreprise.
C’est à dire qu’on prend des cibles, restreintes, bien identifiées, à « portée de main », contre lesquelles on peut effectivement se battre et on fixe l’objectif à atteindre et on se bat tant qu’il n’est pas atteint. La lutte contre Agrexco a été très courte : 2 ans et demi. Et surtout on ne se disperse pas dans un saupoudrage multipliant les cibles sans fixer d’objectif aux actions.
2- La cible c’est Israël, en tant qu’état raciste et d’apartheid et tous ses représentants.
Toutes les cibles sont des substituts d’Israël et tous les petits objectifs ne visent qu’une chose : délégitimer Israël en tant qu’état. Il s’agit d’affaiblir Israël afin qu’il respecte le droit international mais la référence au droit a cessé d’être incantatoire elle s’incarne dans l’application des 3 revendications.
L’appel de la CCA est clair, c’est en raison des violations et des crimes d’Israël dont Gaza le dernier en date, qu’on s’attaque à la cible Agrexco, représentant d’Israël. Le fait qu’Agrexco ait été (j’espère que vous savourez ce passé composé !) le fer de lance de la colonisation dans la vallée du Jourdain est un facteur facilitant la dénonciation mais en aucun cas la cause du choix. L’objectif était sans appel et non négociable : « agrexco ni à Sète ni ailleurs ». Agrexco/israël et le CRIF ont tenté de de trouver une faille avec l’opération les fraises de Gaza. Le boycott total d’Agrexco était la seule réponse possible sous peine de faire capoter la campagne et on l’a tenue grâce au BNC, Je vais y revenir.
3 – C’est avant tout dans chaque pays que les sociétés civiles doivent se battre contre Israël et ses complices.
Le renversement opéré par l’appel BDS dans la stratégie du mouvement de solidarité modifie le périmètre de la solidarité et relocalise la solidarité internationale.
Dans le cadre d’Oslo la solidarité était une solidarité d’exogène, cad apportée de l’extérieur. On considère que le problème est « là-bas » et que nous « ici » on doit apporter notre soutien aux palestiniens « là-bas » à des milliers de km. Si bien que les cibles sont toujours « là-bas » à des milliers de km. « Ici », au mieux on dénonce la complicité de notre gouvernement et/ou de l’UE.
Pour éviter que l’action contre Agrexco ne se cantonne à la seule dénonciation il convenait d’inverser les rapports, passer de la solidarité exogène à la lutte ici contre Israël (Agrexco dans le cas précis) comme le préconise le BNC.
Pour cela nous sommes partis des campagnes, des actions, des luttes, des revendications menées ici par les organisations de la CCA, en essayant de voir Les organisations ont été invitées à mettre en avant ce qu’elles pouvaient porter en elles d’oppositions à la venue d’Agrexco. De puiser dans leurs valeurs les raisons et les motifs de refuser la venue d’Agrexco en lien avec les luttes quelles menaient ici.
Ainsi a donné lieu à des réflexions sur le développement du port et de la Région. La confédération paysanne et les décroissants ont montré qu’il y avaient d’autres motifs de solidarité que la défense de la terre et de l’eau, et qu’au nom de la souveraineté alimentaire et de l’agriculture industrielle on pouvait s’opposer aux exportations d’Agrexco d’où quelles viennent ! ce qui est une manière nouvelle d’élargir le périmètre de la solidarité.
3 et j’en termine :
L’implication directe du BNC dans la bataille
Nous n’avons pas l’habitude de ce type d’intervention palestinienne directement dans une lutte en France, voire dans ce qui fait débat au sein du mouvement de solidarité.
2 mois après la création de la CCA, nous sommes en Palestine dans le cadre d’une mission CCIPPP spéciale (avec NPA, CIMADE, CCIPPP et CMF), nous rencontrons une partie du secrétariat du BNC et Omar Bargouthi nous affirme qu’il faut faire de la CCA une action pilote visant à construire le boycott européen d ‘Agrexco, qu’il va intervenir auprès de ses contacts etc. Ce qu’il fait. Dès notre retour nous allons en Italie, Suisse, Angleterre… et lors des 8h contre agrexco et pour le port de Sète, en octobre 2009, Omar est présent ainsi que des représentants d’Ecosse, d’Angleterre et d’Italie et nous mettons en place l’embryon de la coordination européenne avec une liste etc. Cad que le BNC ne dit pas faites ceci cela, il se met au travail avec nous.
Je n’ai pas le temps ici mais je vous invite à suivre sur le site de la coalition (coalitioncontreagrexco.net) la bataille contre l’opération « les fraises de Gaza » menée par Agrexco/Israël/CRIF et qui a été un fiasco complet pour eux et ceci grâce à l’intervention directe du BNC.
L’Appel BDS et la participation directe du BNC aux actions est un phénomène nouveau qui installe la centralité du BNC dans la campagne BDS et de fait, dans tout le mouvement de solidarité international.
C’est ce qui me fait dire que la victoire contre Agrexco est surtout une victoire des choix politiques du BNC, car face à l’impasse criminelle que représente le processus de Paix, elle ouvre au mouvement de solidarité une voie stratégique qui en moins de 3 ans en France a déjà fait ses preuves..
Merci.
JLM – BDSFrance
http://www.mehadrindegage.net/node/4